Selon un récent rapport le DOGE Department of Government Efficiency aurait permis de réduire les dépenses publiques de 15 % depuis sa création. Cette initiative, lancée par Donald Trump et Elon Musk, visait à rationaliser les processus administratifs et à éliminer les redondances bureaucratiques au sein du gouvernement américain.
Malgré ces chiffres, le programme suscite des débats intenses. Les partisans saluent une modernisation nécessaire de l’administration, tandis que les détracteurs pointent du doigt des coupes budgétaires qui auraient affecté certains services publics essentiels. Les critiques soulignent également une approche parfois trop technocratique, privilégiant l’efficacité au détriment de l’équité sociale.
Alors que le DOGE continue de faire couler beaucoup d’encre, il est fondamental de comprendre les implications réelles de cette réforme sur la gouvernance américaine et de faire un parallèle avec notre administration.
Services publics : quand les Français veulent mieux, les États-Unis veulent moins
Alors que les Français plébiscitent une amélioration des services publics sans hausse des impôts, les États-Unis amorcent une réforme radicale de leur administration :
réduction massive des effectifs, gel des recrutements, recentrage budgétaire extrême. Deux visions qui s’opposent — mais qui interrogent, toutes deux, la place et le rôle de l’État au XXIe siècle.
En France : une demande forte de qualité, pas de rupture
L’enquête menée en 2024 par l’Institut Paul Delouvrier auprès de plus de 12 000 usagers révèle un message clair :
les Français restent très attachés à leurs services publics, qu’ils jugent satisfaisants dans leur ensemble (77 % d’avis positifs), mais perfectibles.
Ce qui est attendu ? Une amélioration concrète dans les domaines jugés prioritaires :
- La santé en tête (52 %), même si l’inquiétude progresse.
- L’éducation, la sécurité, la justice suivent de près.
- La défense nationale, elle, n’est une priorité que pour 17 % des sondés.
Fait marquant : les usagers récents (ayant eu une expérience directe avec l’administration) sont
nettement plus positifs que ceux qui n’ont qu’une opinion à distance. Le fossé entre image et réalité se creuse, en particulier à l’ère numérique.
Aux États-Unis : une réforme-choc du service public
Au même moment, l’administration fédérale américaine s’engage dans une transformation brutale, via la création du
DOGE (Department of Government Efficiency), impulsée par un décret présidentiel en janvier 2025.
Objectif : Réduire les dépenses fédérales de 2600 milliards de dollars sur quatre ans.
Moyens :
- Suppression de 210 000 postes sur le plan national.
- Gel ou restriction des embauches.
- Externalisation massive de certaines fonctions.
- Renforcement du contrôle et de la surveillance des employés publics.
- Coupes sévères dans les secteurs sociaux (logement, sécurité sociale, etc.).
Les syndicats dénoncent une attaque directe contre la stabilité de la fonction publique et
l’universalité de l’accès aux services. Plusieurs experts parlent d’une « uberisation » de l’État,
avec des logiques inspirées de l’univers technologique (notamment Elon Musk).
Deux visions, deux philosophies de l’État
🇫🇷 France |
🇺🇸 États-Unis |
|---|---|
Attente d’amélioration et de justice dans les services publics |
Objectif de réduction drastique des dépenses |
Attachement fort aux missions régaliennes et sociales |
Vision utilitariste et managériale du service public |
Usagers globalement satisfaits mais critiques |
Risque de rupture dans la continuité des services |
Quelles économies le DOGE a-t-il réellement réalisées ?
Le Département de l’Efficacité du Gouvernement (DOGE), dirigé par Elon Musk, a annoncé avoir économisé 115 milliards de dollars pour le gouvernement fédéral. Ces chiffres sont controversés. Les analystes de Bank of America estiment que certaines économies sont exagérées, notamment les 24,8 milliards de dollars revendiqués. Ces économies regroupent 20 milliards de dollars provenant de 5 356 résiliations de contrats, bien que les économies réelles soient de 17,97 milliards de dollars. Des erreurs ont été identifiées dans les rapports du DOGE, avec des économies totales réduites de 4 milliards de dollars après la suppression de plus de 1 000 affirmations de résiliation de contrats.
Les économies annoncées par le DOGE comprennent également 15 milliards de dollars de 4 083 contrats annulés, avec des économies réelles de 10,23 milliards de dollars. Un contrat annulé avec Centennial Technologies, affichant une économie de 1,9 milliard de dollars, a en réalité été résilié sous l’administration précédente. Les experts critiquent ces affirmations, indiquant que les économies sont surestimées de 80%. Les économies du Département de l’Intérieur ont atteint 3,0 milliards de dollars, une augmentation significative par rapport aux 144 millions de dollars de la semaine précédente. (sources : harvard et Fortune)
Le tableau ci-dessous résume certaines des économies revendiquées par le DOGE :
Catégorie |
Économies revendiquées |
Économies réelles |
|---|---|---|
💰 Résiliations de contrats |
20 milliards de dollars |
17,97 milliards de dollars |
💰 Annulations de contrats |
15 milliards de dollars |
10,23 milliards de dollars |
💰 Résiliations de baux |
500 millions de dollars |
489 millions de dollars |
Quelle est la critique des experts sur la gestion du DOGE ?
Les experts expriment des réserves sur la gestion du DOGE par Elon Musk. Linda J. Bilmes critique son approche, la qualifiant de chaotique et destructrice. Elle suggère que Musk aurait pu favoriser l’innovation plutôt que de démanteler des structures existantes. John Donahue, quant à lui, déplore le manque de réformes constructives, soulignant que la méthode de Musk s’apparente à un « marteau-piqueur ». Ces critiques soulignent l’importance de réformes réfléchies et durables plutôt que d’actions précipitées.
Les économies revendiquées par le DOGE dans les contrats du Département de la Défense sont restées inchangées à 14,1 millions de dollars depuis le 24 mars. Les économies de l’USAID représentent la moitié des économies totales de l’agence, bien que de nombreux détails de contrats aient été supprimés, rendant la vérification indépendante difficile. Les économies annoncées regroupent également 9,1 millions de dollars sur un contrat de maintenance de simulateur de vol, bien que les paiements réels aient été inférieurs à 40 000 dollars.
Pour compléter, les initiatives précédentes telles que la Grace Commission de 1982 et l’initiative de réinvention du gouvernement de Bill Clinton avaient tenté d’intégrer des idées du secteur privé au gouvernement fédéral. Ces tentatives montrent la complexité de la réforme gouvernementale et la nécessité d’une approche équilibrée. Les critiques actuelles mettent en lumière l’importance de la transparence et de la précision dans la communication des résultats économiques.
Quelles leçons tirer de l’expérience du DOGE ?
La mise en place du DOGE par Trump et Musk soulève des questions sur l’efficacité des réformes gouvernementales inspirées du secteur privé. L’approche entrepreneuriale adoptée par Elon Musk visait à rationaliser les dépenses publiques en s’appuyant sur des méthodes de gestion innovantes. Les résultats mitigés du DOGE montrent que transposer des pratiques d’entreprise au secteur public n’est pas sans enjeux. L’importance d’une évaluation rigoureuse et d’une adaptation aux spécificités du gouvernement est capitale pour garantir la réussite de telles initiatives.
Un autre aspect à considérer est l’impact des réformes sur les employés du gouvernement. La politique de résiliation massive de contrats a eu des répercussions sur l’emploi et la motivation des fonctionnaires. Les changements brusques peuvent engendrer une incertitude et une résistance au sein des institutions, compromettant ainsi l’efficacité des réformes. Il faut trouver un équilibre entre l’innovation et la stabilité pour assurer une transition en douceur et maintenir un climat de travail positif.
L’expérience du DOGE met en lumière la nécessité de la transparence et de la communication dans la gestion publique. Les critiques concernant l’exagération des économies réalisées et le manque de clarté dans les rapports soulignent l’importance d’une communication honnête et précise avec le public et les parties prenantes. Une gestion transparente favorise la confiance et l’adhésion aux réformes, éléments essentiels pour leur succès à long terme.
Et demain ?
Pour les Français, ces deux modèles soulèvent une question essentielle :
Faut-il réduire l’État, ou mieux l’adapter ?
Alors que l’administration française entame des réformes de simplification, de dématérialisation et d’efficacité, l’exemple américain agit comme un miroir extrême — révélant par contraste les valeurs que les citoyens européens, et particulièrement français, continuent à défendre : l’accès, l’équité et la continuité du service public.
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