Des primes pour venir travailler ? Le pari risqué de l’État contre l’absentéisme

Fabrice

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Chaque année, l’absentéisme dans la fonction publique coûte à l’État français près de 4 milliards d’euros. Ce chiffre, à lui seul, interroge sur l’efficacité des mesures actuelles pour contrer ce phénomène. Alors que certaines entreprises privées ont déjà adopté des stratégies innovantes, la fonction publique reste en quête de solutions viables.

Face à ce constat préoccupant, une nouvelle approche fait son chemin : l’octroi de primes pour récompenser la présence assidue des agents. Cette initiative, bien que prometteuse, soulève des questions sur son efficacité réelle et ses implications à long terme. Peut-elle réellement transformer les habitudes et réduire l’absentéisme de manière significative ?

Formation-publique.com revient sur une stratégie audacieuse et sur ses possibles impacts sur le secteur public.

Comment réduire l’absentéisme dans la fonction publique ?

Dans le secteur public, le nombre moyen de jours d’absence pour maladie a augmenté, passant de 10 jours en 2014 à 12 jours en 2019. En comparaison, le secteur privé enregistre un chiffre de 10,3 jours. Les estimations des journées non travaillées pour cause de maladie fluctuent entre 11,1 et 11,9 milliards d’euros, représentant entre 241 000 et 259 000 ETP. Aligner les chiffres de la fonction publique avec ceux du privé pourrait générer près de 2 milliards d’euros d’économies.

Les statistiques par versant de la fonction publique montrent des disparités :

  • la fonction publique de l’État (hors enseignants) enregistre 8,4 jours d’absence,
  • les enseignants 9,3 jours,
  • la fonction publique hospitalière 14 jours,
  • la fonction publique territoriale 14,7 jours.
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En 2022, le coût des absences pour raisons de santé pour les employeurs publics s’élevait à 15 milliards d’euros. La réintroduction d’un jour de carence a permis d’économiser 134 millions d’euros en 2023.

Les primes de présentéisme : solution ou illusion ?

Plusieurs collectivités ont mis en place des primes de présentéisme pour réduire l’absentéisme. À la RATP, une prime allant de 100 euros le premier mois à 450 euros après trois mois consécutifs sans absence a été instaurée, malgré un taux d’absentéisme de 13% en 2022. À Florensac, une prime de 50 euros par mois a permis de réduire l’absentéisme de 18% à moins de 4% en deux ans. À Bompas, une prime de 40 euros par mois n’a pas empêché le taux d’absentéisme de remonter à 15% après une baisse initiale.

Les primes de présentéisme soulèvent des questions juridiques. Un arrêt du Conseil d’État du 11 septembre 2006 reconnaît la possibilité de diminuer ou supprimer une prime en fonction du nombre d’absences.

Un arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 6 mars 2013 a jugé illégale une prime d’assiduité de 100 euros pour les agents sans congé maladie durant un an, en raison du non-respect du principe de parité.

Impact sur les finances et sur la qualité du service

L’absentéisme a un impact financier direct sur les finances des collectivités et dégrade la qualité du service. L’allongement du délai de carence à trois jours pourrait induire une économie de 112 millions d’euros pour le budget de l’État et de 289 millions d’euros pour l’ensemble de la fonction publique.

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Une diminution du taux de remplacement pourrait représenter des économies de 300 millions d’euros pour chaque versant, selon l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale des affaires sociales (Igas).

Entité
Taux d’absentéisme
Prime de présentéisme
RATP
13%
100 à 450 euros
Florensac
Moins de 4%
50 euros par mois
Bompas
15%
40 euros par mois

Les primes de présentéisme, bien qu’efficaces dans certains cas, ne suffisent pas à elles seules pour lutter contre l’absentéisme. Elles doivent être accompagnées de mesures structurelles pour améliorer la qualité de vie au travail et répondre aux aspirations de carrière des agents.

Quelles alternatives aux primes pour réduire l’absentéisme ?

Face à l’inefficacité partielle des primes de présentéisme, il faut explorer d’autres stratégies pour lutter contre l’absentéisme dans la fonction publique. Ces alternatives pourraient s’avérer plus durables et mieux adaptées aux besoins des agents, tout en étant conformes aux exigences légales.

Améliorer les conditions de travail pourrait être une solution efficace pour réduire l’absentéisme. Un environnement de travail sain et stimulant peut avoir un impact significatif sur la motivation des employés. Cela inclut non seulement l’ergonomie des postes de travail mais aussi la promotion d’une culture d’entreprise positive. Des initiatives telles que le télétravail, la flexibilité des horaires, et l’accès à des services de bien-être peuvent contribuer à diminuer le stress et l’épuisement professionnel.

Un autre levier pourrait être le développement professionnel et la formation continue. En offrant aux agents des opportunités de formation et de développement de carrière, les employeurs peuvent renforcer l’engagement et la satisfaction au travail. Les employés qui voient un avenir dans leur carrière sont généralement plus motivés et moins enclins à s’absenter. Cela peut inclure des programmes de mentorat, des ateliers de développement personnel, ou encore des formations techniques pour acquérir de nouvelles compétences.

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La mise en place de mesures de reconnaissance et de valorisation peut également jouer un rôle capital. Les agents qui se sentent valorisés pour leur travail sont plus susceptibles de s’investir et de maintenir une présence régulière. Cela peut passer par des systèmes de récompenses non financières, comme les reconnaissances publiques, les lettres de remerciement, ou encore les opportunités de progression interne.

Comment les agents publics sont-ils soutenus en cas de maladie prolongée ?

Les agents publics confrontés à des maladies prolongées bénéficient d’un soutien financier partiel. Lorsqu’ils sont en congé de longue maladie (CLM) ou de grave maladie (CGM), ils continuent de percevoir une partie de leur régime indemnitaire. La première année, ils reçoivent 33 % de leur indemnité, ce qui leur assure un revenu de base malgré leur incapacité à travailler.

Pour les deux années suivantes, le soutien financier augmente. Les agents en CLM ou CGM voient leur indemnité partielle passer à 60 %. Cela permet de mieux compenser la perte de salaire et de réduire les difficultés financières durant ces périodes difficiles. Précisons que les primes sont suspendues en cas de congé de longue durée (CLD).

Face à ce challenge complexe, une approche globale est recommandée. Combiner des conditions de travail améliorées avec des dispositifs financiers incitatifs semble être la stratégie la plus efficace. Cela permet non seulement de soutenir les agents financièrement, mais aussi d’améliorer leur bien-être général et de favoriser un retour au travail plus serein.

Fabrice

Fabrice DURAND

Entrepreneur et passionné par l'orientation professionnelle, j'ai créé formation-publique pour vous accompagner dans le choix de vos formations. Je suis également responsable du groupe Facebook Orientation scolaire.

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